La plus forte arrogance du sg du MPS, Mahamat Zene Bada, était peut-être de déclarer le week-end dernier sur les télévisions, en face à ses co-panelistes que « puisque le gouvernement veut 188 députés, nous aurons 188 députés. Souffrez que cela reste ainsi. Ensuite, lorsque vous serez au pouvoir, vous pourrez augmenter à 500 ou 600 députés, si cela vous convient ». Je me suis permis de présenter une analyse sur le fond de ces propos.
A la réalité, le débat n’est pas tant au sujet du nombre de députés. Il est au niveau de la répartition de ce nombre entre les différents départements et/ou provinces. Sur cette question, les Tchadiens sont unanimement vent debout. Il s’agit d’une injustice inadmissible, qui remet en cause les principes républicains et démocratiques. Plusieurs organisations de la société civile sont rouges de colère contre cette ordonnance inique, fixant le nombre de députés. Plusieurs partis politiques aussi. Les plateaux de télévisions, radios et colonnes des journaux sont inondés par des réactions des acteurs politiques et des leaders d’opinion, qui dénoncent cette ordonnance accusée de mettre en mal la cohésion sociale. C’est pourquoi 𝐥𝐚 𝐬𝐞𝐮𝐥𝐞 𝐜𝐡𝐨𝐬𝐞 𝐛𝐨𝐧𝐧𝐞 𝐝𝐚𝐧𝐬 𝐜𝐞𝐬 𝐥𝐨𝐢𝐬, 𝐜’𝐞𝐬𝐭 𝐪𝐮’𝐞𝐥𝐥𝐞𝐬 𝐯𝐨𝐧𝐭 𝐚𝐜𝐜é𝐥é𝐫𝐞𝐫 𝐥𝐚 𝐝𝐢𝐯𝐢𝐬𝐢𝐨𝐧 𝐝𝐮 𝐓𝐜𝐡𝐚𝐝. 𝐂𝐨𝐦𝐩𝐫𝐞𝐧𝐧𝐞 𝐪𝐮𝐢 𝐩𝐨𝐮𝐫𝐫𝐚 !
Et les tenants du pouvoir se sont rendus compte de l’impopularité de ces réformes. D’où l’incitation de ce débat voulu et planifié par le sg du MPS, ayant choisi les débateurs de son goût pour le besoin de la cause… L’objectif étant, a priori, de préparer l’opinion à un passage en force. Mais, ce que les Tchadiens doivent comprendre, face à cette contestable générale, le but dégagé de ce débat est manifestement de conquérir la légitimité de leur pouvoir par l’imposition de la dialectique Nord-Sud. Et c’est fait à dessein pour gagner l’opinion du Nord avec eux, puisque ceux-ci trouvent justement leur compte dans cette injustice. Bien qu’il est vrai, il ne faille pas occulter le fait qu’une frange de concitoyens de la zone septentrionale du pays sont opposés à cette loi qu’il considère comme comportant des germes d’un malaise social profond.
Dans le fond, de tous les arguments avancés par Zene Bada, aucun ne tient la route. Quand bien même il avait en face de lui un duo qui n’a pas pu battre en brèche ses arguments de comparaison qui relèvent uniquement de la mauvaise foi. J’en prends un en exemple. 𝐋𝐨𝐫𝐬𝐪𝐮𝐞 𝐥𝐞 𝐬𝐠 𝐝𝐮 𝐌𝐩𝐬 𝐩𝐨𝐢𝐧𝐭𝐞 𝐪𝐮𝐞 𝐜𝐞𝐫𝐭𝐚𝐢𝐧𝐞𝐬 𝐩𝐚𝐫𝐭𝐢𝐞𝐬 𝐝𝐮 𝐩𝐚𝐲𝐬, 𝐞𝐧 𝐫𝐚𝐢𝐬𝐨𝐧 𝐝𝐞 𝐥𝐞𝐮𝐫 é𝐥𝐨𝐢𝐠𝐧𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐝𝐞𝐬 𝐜𝐞𝐧𝐭𝐫𝐞𝐬 𝐮𝐫𝐛𝐚𝐢𝐧𝐬, 𝐬𝐨𝐧𝐭 𝐞𝐧 𝐫𝐞𝐭𝐚𝐫𝐝 𝐬𝐮𝐫 𝐥𝐞 𝐝é𝐯𝐞𝐥𝐨𝐩𝐩𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐞𝐭 𝐪𝐮’𝐢𝐥 𝐟𝐚𝐢𝐥𝐥𝐞 𝐥𝐞𝐬 é𝐫𝐢𝐠𝐞𝐫 𝐞𝐧 𝐝é𝐩𝐚𝐫𝐭𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐨𝐮 𝐚𝐮𝐭𝐫𝐞𝐬 𝐞𝐭 𝐥𝐞𝐮𝐫 𝐚𝐟𝐟𝐞𝐜𝐭𝐞𝐫 𝐝𝐞𝐬 𝐝é𝐩𝐮𝐭é𝐬 𝐩𝐨𝐮𝐫 𝐚𝐜𝐭𝐞𝐫 𝐥𝐞𝐮𝐫 𝐝é𝐯𝐞𝐥𝐨𝐩𝐩𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭, 𝐦ê𝐦𝐞 𝐮𝐧 é𝐭𝐮𝐝𝐢𝐚𝐧𝐭 𝐝𝐞 𝐩𝐫𝐞𝐦𝐢è𝐫𝐞 𝐚𝐧𝐧é𝐞 𝐝’𝐮𝐧𝐢𝐯𝐞𝐫𝐬𝐢𝐭é, 𝐬’𝐢𝐥 𝐞𝐬𝐭 é𝐯𝐞𝐢𝐥𝐥é, 𝐧𝐞 𝐭𝐢𝐞𝐧𝐝𝐫𝐚𝐢𝐭 𝐩𝐚𝐬 𝐮𝐧 𝐭𝐞𝐥 𝐚𝐫𝐠𝐮𝐦𝐞𝐧𝐭.
Sinon, si ériger une localité en département ou sous-préfecture la ferait développer, pourquoi n’y a-t-il pas de route, d’électricité, de l’eau potable, aucune infrastructure viable, etc. à LAÏ ? Pourquoi MAO est-il aussi pitoyable ? Pourquoi BITKINE et même MONGO manquent de ce qui est simplement vital ? Pourquoi PALA est si misérable ? Encore que la Province du WADI FIRA compte 422 enseignants du primaire, dont 340 sont des maîtres communautaires. Et que le département couvrant la ville de BILTINE, le district sanitaire qui compte 30 zones d’intervention ne dispose d’aucun véhicule pour la supervision dans les différentes structures de santé. Et FAYA alors ?On pourrait ainsi allonger la liste… Zene Bada le sait-il ? Où est là le développement ? De la pire supercherie !
Pour ne pas se voiler la face, il convient de dire qu’il ne s’agit pas de rapprocher les citoyens des administrations pour les développer car même un début de développement n’a jamais été le carburant de ce système qui fait du mal à tous les Tchadiens, au profit d’une petite minorité oligarchique. Sauf à nous prouver le contraire maintenant. Mais ce n’est pas en le faisant dans l’injustice ! Il clairement question d’une réforme dont la visée est la domination politique. C’est une réforme fondée sur une idéologie politique, socioculturelle et philosophique, en ce qu’elle incarnera dans la représentation nationale. Elle ne répond à aucun critère scientifique.
C’est ainsi qu’à la lisière de son langage guerrier, la posture ostentatoire de Zene Bada, dans l’arrogance absolue, laisse entendre qu’ils ont pris le pouvoir par les armes, ils en feraient ce qu’ils veulent. N’en déplaisent aux opposants ! Il l’a d’ailleurs dit et répété « c’est notre pouvoir ». Nous desquels ? Je suppose que ça été compris par les destinateurs. Par ailleurs et subtilement par cette expression, l’idée derrière est d’écarter toute intention de rapprochement possible entre le président Mahamat et l’opposition.
Toutefois, dans le contexte politique actuel, marqué par le manque de légitimité du pouvoir, mal élu de Mahamat Kaka, il faut se garder à l’esprit, sans être naïf, que Kaka pourrait aussi se servir de ce genre de débat (surtout qu’il a été autorisé d’être organisé sur la télévision publique) pour reprendre la main. Ça pourra être pour lui le moyen de paraître comme le réparateur des torts en renvoyant cette loi à la seconde lecture devant le Conseil national de transition.
Une telle hypothèse laisse penser que toutes ces manœuvres cherchent à se servir de l’adversité violente pour contourner le manque de légitimité dont le régime souffre. Mais s’il ne le fait pas en dépit de la contestation, il nous donnera une grille de lecture plus claire de ses intentions politiques. Y compris pour l’avenir. C’est la raison pour laquelle il faut avoir ces gens à l’œil. Car plus tard sera trop tard.
par Azoud Aweina Damdou