Aviation civile Tchad : deux compagnies basées aux Emirats Arabes-unis au cœur d’un réseau des faussaires

Samedi 27 mai 2023, le Conseil de l’Autorité de l’aviation civile du Tchad (ADAC) a, au cours d’un point de presse, fourni « des informations à l’opinion nationale et internationale sur les résultats des enquêtes menées concernant une affaire de faux en écriture publique et usage de faux ». Selon Me Mbaigolmem Frédéric représentant le Cabinet d’Avocat Franklass, cette affaire absolument louche « porte atteinte à l’image et à la crédibilité du Tchad en matière d’aviation civile ». Ces actes des faussaires auraient cours entre 2018 et 2022.

« Courant mars 2023, l’Autorité de l’aviation civile sud soudanaise avait saisi l’ADAC à l’effet de vérifier l’authenticité des documents d’un avion-cargo de type Antonov 32A, arborant une immatriculation tchadienne TT AEJ », a informé à l’entame de sa déclaration Mbaigolmem Frédéric.

Un contrôle express de l’Autorité de l’aviation civile du Tchad a permis de vérifier l’authenticité de cette immatriculation et de tous les documents y afférents, apprend-on. A la grande  surprise du staff de l’ADAC « l’immatriculation et les autres documents sont tous faux », renseigne l’avocat.

Face à ce fait, le Directeur général de l’ADAC, Mahamat Aware Neissa, « s’est résolument déterminé à élucider cette nébuleuse organisation tentaculaire qui sape sans cesse, avec la complicité des agents locaux, la crédibilité de l’aviation civile tchadienne », nous apprend le Conseil de l’autorité de régulation du secteur aérien tchadien. Selon le conseil, Mahamat Aware Neissa veut « démanteler définitivement ce réseau des faussaires et leurs complices, lesquels produisent, de façon répétée depuis 2017, des faux documents d’avions au nom de l’aviation civile tchadienne ».

C’est ainsi qu’une première mission a été dépêchée à Juba au Soudan du sud du 27 au 31 mars 2023. La mission découvre que « cet aéronef Antonov 32A est basé à Juba depuis octobre 2022, et exploité pour le compte d’une compagnie sud soudanaise dénommée TOR AIR Aviation. L’avion est loué par TOR AIR Aviation auprès de la société AERO Express FZE, laquelle est basée à Sharjah », précise ADAC par l’entremise de son conseil.

Dans les faits, l’avion appartenait, au début, à la société Aqualine International Corporation Ltd implémentée à Sharjah aux Emirats Arabes Unis, « avant de passer entre les mains d’AERO Express FZE. Curieusement, son immatriculation et son certificat de navigabilité avaient été établis au nom de l’exploitant tchadien SKY AIR Corporation ».

Les faits sont accablants. L’ADAC dit être surprise d’avoir constaté l’utilisation d’un faux certificat de radiation en juin 2018 au profit de l’avion B737-500, immatriculé TT-DIZ, avion appartenant à la société Aqualine International Corporation Ltd. Cette même société d’Aqualine International Corporation Ltd se retrouve être le propriétaire de l’Antonov 32A, tenez-vous bien, avec un faux certificat de radiation béninois TY-AEJ datant du 4 juillet 2022 avant de passer sous pavillon tchadien avec la fausse immatriculation TT-AEJ à partir du 6 juillet 2022.

En révélation de toute cette gymnastique, présagerait qu’Aqualine International serait au cœur de ce réseau. Tout compte fait, « la mission de Juba a permis de remonter la filière des faussaires, lesquels sont nommément identifiés à savoir les sociétés Aqualine International et Aero Express FZE, dont les sièges officiels se trouvent basés à Sharjah aux Emirats Arabes Unis », explique l’Avocat.

Une seconde mission de l’ADAC, a été dépêchée  à Sharjah aux Emirats Arabes Unis du 25 avril au 1er mai 2023, où sont basées ces deux sociétés. Cette mission, avec l’implication appuyée de l’Ambassade du Tchad aux Emirats Arabes Unis, a permis de « prendre à ses propres pièges la société Aqualine International Corporation Ltd », démontre Me Mbaigolmem Frédéric « sur les méandres de ce réseau nébuleux dont la société Aqualine International Corporation se révèle clairement être le cerveau ». En effet, toutes les transactions et petits détails de vente ont été remontés.  

A cette date, l’Autorité de l’aviation civile du Tchad (ADAC), par le biais de son conseil, a déjà saisi la justice tchadienne, et réclame plus de 600 millions d’amende et 10 milliards de dommages et intérêts au profit de l’Etat tchadien. Quelle sera la suite à donner ? C’est la question de savoir que nous avons posée. Selon une source proche du dossier, avec la publication des résultats de ces enquêtes, « menées dans la stricte discrétion, l’affaire sera officiellement remise au Secrétariat général du gouvernement qui est chargé du contentieux tchadien ».