Le 29 mai 2023, les ministres en charge de l’Education nationale et l’Enseignement supérieur étaient dans le bâtiment qui tient lieu de l’Assemblée nationale. Devant les conseillers nationaux. Pour répondre aux questions orales des conseillers nationaux de transition. Ordre du jour bien circonscrit. Moussa Kadam, de l’Education nationale et son collègue Tom Erdimi de l’Enseignement supérieur ont fait face à des conseillers visiblement trop fâchés sur l’état de l’éducation nationale. Visiblement… L’on comprend que cette convocation est motivée par la publication d’un rapport de la Banque mondiale sur le système éducatif tchadien, la semaine surpassée.
Au cours de cette audience, beaucoup de choses ont été dites. Beaucoup. Avec un œil critique, l’on retient même que certains conseillers s’étaient donné le loisir de se défouler. Défouler, oui car ils sont conscients qu’au-delà de leur constatation faite, il ne faut pas surtout s’attendre à quelque chose de plus. Encore qu’ils ne semblent pas avoir cerné toutes les problématiques du système éducatif tchadien autour des autres maillons…
Dans les différentes réactions relayées ici et là par des médias locaux, l’on ne manque pas d’être inspiré ou alors être tenté de réagir en retour. C’est, comme pour ce cas, un extrait d’interventions du ministre de l’Education nationale : « Vous prenez les 5 000 jeunes qui viennent d’être intégrés, nous avons vu pratiquement 3 000 enseignants intégrés, je dis bien enseignants entre guillemets. Je ne parlerais pas de ‘’boulangers’’, mais il est important de noter que près de 54 % des personnes intégrées n’ont aucun profil adéquat pour l’enseignement », a révélé Moussa Kadam.
Cette révélation est en réponse à une observation soulevée avec question par le Conseiller Brahim Ben Seid, pour qui des boulangers sont intégrés en lieu et places enseignants.
Faut-il y voir la fatalité ?
Certes, il est connu la léthargie dans laquelle est plongé le système éducatif tchadien, depuis ces dernières décennies. Cependant, en écoutant cet élément de réponse précédent du ministre Moussa Kadam, l’on réalise que le système éducatif tchadien est plongé dans une fatalité sans pareil. Non seulement des boulangers et autres se retrouvent devant les tableaux pour enseigner, mais plus de 54% de nouveaux enseignants intégrés n’ont pas de profil adéquat pour l’enseignement, c’est-à-dire ils sont étrangères pour le système… Quel malheur !
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Ça n’est pas une surprise, en tout cas. Selon certaines informations, ce sont des gens proposés par des politico-militaires comme leurs éléments pour être intégrés. L’on comprend mieux… Le ministre vient de le confirmer. De toutes les façons, voulait-on vraiment intégrer des enseignants pour l’éducation nationale ? Non ! Si l’on les cherchait, on savait où se forment des enseignants, même si ceux-ci n’auraient pas du tout fait une demande d’intégration. Le détail, on le connaît.
Ce qui est angoissant, c’est de constater que, conseillers nationaux et ministres sont tombés d’accord sur le fait : l’éducation nationale a périclité. Atteinte par une incurie impossible d’être extirpée pour le moment.
A la surprise de beaucoup, au lieu d’être une audience qui oppose les points de vue des membres du gouvernement des membres du CNT, ils ont la même convergence de vues, et ils se complètent d’ailleurs mutuellement. La question est donc de savoir : après avoir constaté la mort lente mais profonde de l’école tchadienne, après avoir diagnostiqué le mal (même s’il l’est encore à moitié), que proposent-ils comme solutions ? Quelles actions envisagent-ils ? Avec quels mécanismes ? L’on est dubitatif.
Et les autres questions alors ?
En réalité, le mal du système éducatif est plus que ces réalités caustiques qui sont soulevées par cette audience. A-t-on parlé des autres partenaires du système éducatif, aux côtés des enseignants ? Un système éducatif, en effet, ce sont les élèves ; ce sont les parents ; ce sont les matériels didactiques (dont les livres) ; c’est l’Etat (le politique et les différents niveaux des responsables administratifs et pédagogiques) ; ce sont aussi les cadres d’apprentissages, etc…
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Savez-vous dans quelles situations de classe apprennent la plupart des élèves tchadiens ? Savez-vous que les élèves comme enseignants n’ont pas de livre ? Savez-vous que le peu de livres qu’on peut trouver rarement sont inadéquats avec les programmes ? Savez-vous que la chaîne administrative et pédagogique de l’éducation nationale est absolument rabougrie ? Savez-vous que les parents d’élèves ont démissionné de leur rôle ? Nous nous interrogeons sans réponse conséquente.
Ces sujets sont tout autant importants que la préoccupation autour des enseignants non qualifiés et leurs faux collègues. Mais ils ont été à peine effleurés. Comme pour dire que le verre est déjà dans le fruit et qu’officiellement le CNT et le gouvernement confirment les résultats de rapport de la Banque mondiale, qui a désormais raison de cesser avec ses engagements financiers en faveur de l’éducation tchadienne, qui va à reculons. Les éléments démontrés et qui font actuellement froid dans le dos ne sont que la partie visible de l’iceberg.