Le 20 avril 2021, le Tchad amorçait une période de transition. C’est après la mort brutale et tragique du président défunt, Idriss Deby Itno, intervenue plus tôt le 18 avril. La transition mise en place, avec un visage à la fois bon et écorné. Il est déjà deux ans passés. Une transition, qui choque, fait regretter et inquiète plus qu’il n’inspire confiance, plus qu’à son début. Autant dire, les deux années sont parsemées d’embuches qui plongent le Tchad dans un avenir politique incertain.
Son mérite et son succès tiennent en sa capacité de réussir à faire fléchir l’échine aux opposants les plus coriaces à Deby père. Des opposants internes, tel que Ngarlej Yorongor et des rebelles, comme Timan Erdimi qui ont finalement lâché prise. Même si plusieurs acteurs politiques tels que Succès Masra, Max Kemkoye, Avocksouma Djona Atchenemou, Yaya Dillo sont restés en dehors du processus de ladite transition et les mouvements rebelles tout comme le Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT).
L’annonce des quinze (15) généraux qui se sont installés au pouvoir, le 20 avril 2021, était flatteuse. Et beaucoup de partenaires avaient été flattés au point de croire que la transition tchadienne était un modèle. Tant, les autorités de la transition ont réussi à lui faire accepter le caractère exceptionnel.
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Le plus gros faux pas de la transition tchadienne, c’est l’arnaque qui la caractérise. En effet, au lieu d’être des dirigeants animés de la volonté de maintenir la stabilité du pays et la sécurité des Tchadiens, comme le Conseil militaire de transition (CMT) l’a prétendu à son arrivée, le chef de la junte, Mahamat Idriss Deby Itno a tout d’abord fait dissoudre cet organe pour rester seul maître à bord. En plus de cela, à la faveur d’un dialogue contesté, y compris ceux qui y ont participé mais qui réfute les résolutions, il obtient un ticket pour prolonger la transition d’une nouvelle durée de 24 mois. Les mêmes résolutions donnent à Mahamat Idriss Deby Itno le droit d’éligibilité à la première présidentielle post-transition. Toutes ces arnaques consécutives font de cette transition un pouvoir régulier, au grand dam du peuple, devenu impuissant face à une tyrannie douce.
Une sortie douteuse de la transition
La transition de désormais 48 mois, soit trois ans et demi est aussi un pari de tous les dangers. Personne ne sait comment les accords, ayant conduit à faire rentrer les rebelles, qui restent secrets. Les préalables qui doivent conduire à l’organisation de premières élections sont loin d’être satisfaisants. Avec « un Code électoral scélérate, que personne ne peut accepter », selon le Président de l’UDP, Max Kemkoye, le Tchad va également vers des élections absolument contestables.
Jusqu’aujourd’hui, la mise en place de différents organes en charge de la mise en œuvre des résolutions du Dialogue national inclusif et souverain se fait de manière non consensuelle et elle est plus partisane, surtout en faveur du parti MPS, du défunt président. L’organisation du futur référendum constitutionnel a fait voler en éclats l’alliance au sommet du pouvoir, notamment entre le MPS et l’UNDR du premier ministre, Saleh Kebzabo.
Le Cadre national de concertation des partis politiques (CNCP) qui vient d’être mis en place est fondé sur la fraude et la duperie du MPS. Mais toujours est-il que les acteurs impliqués tiennent leur langue en bride, pour la raison qu’il n’est pas autorisé de dénoncer. Mais une chose est sûre, la transition sera à nouveau prolongée afin que les élections puissent se tenir.
Des tueries inquiétantes
Au bout des 24 mois de la transition, du sang des citoyens tchadiens a coulé. De manière aggravante. Juste à la prise du pouvoir par le CMT, 27 tchadiens sont tombés lors d’une manifestation pacifiste de l’opposition réprimée. Plusieurs personnes arrêtées avant d’être libérées. Il faut dire que depuis l’avènement de la démocratie en 1990, jamais une répression pareille n’a été enregistrée.
Le 14 mai, une autre manifestation est réprimée dans le sang. Six (6) leaders de Wakit Tamma et autres ont été arrêtés après le soir de cette manifestation pour être gardés à vue à la Maison d’arrêt de Klessoum de N’Djaména avant d’être transférés à Moussoro. Ils seront condamnés avec sursis après un simulacre de procès.
Entre le mois d’août et septembre, le siège du parti de Transformateurs, principal parti d’opposition au pouvoir de transition a fait l’objet d’agression policière illégale à plusieurs reprises. Le 20 octobre, c’est le summum de la barbarie organisée par le pouvoir de Mahamat Idriss Deby Itno contre les manifestants sortis contester les résolutions du Dialogue national inclusif et souverain, dans plusieurs villes. L’on dénombre des centaines des morts, des dizaines des personnes disparues, des blessés et des centaines d’arrestations.
Une administration publique incompétente et irresponsable
En dehors de tueries à caractère politique, plusieurs Tchadiens sont morts dans des affrontements intercommunautaires ayant fait des centaines de morts dans plusieurs provinces. Cependant, le pouvoir n’a pas prouvé sa capacité ni sa volonté de combattre ces fléaux qui endeuillent au quotidien de nombreuses familles. L’on note au compte de cette transition le laxisme face aux pillages des ressources financières sans que les auteurs ne soient inquiétés.
La nationalisation des actifs et des droits des sociétés pétrolières en début mars et l’expulsion de l’ambassadeur allemand à N’Djaména, sont les deux derniers actes les plus dangereux qu’il soit. Et l’ensemble de ces actes ont rendu le visage de cette transition manifestation terne. Tout compte fait, la transition n’a réussi qu’en si peu de choses, insignifiantes d’ailleurs.