Depuis quelques jours, le débat sur les réformes administratives et découpage électoral a fait émerger des avis inquiétants qui mettent en mal la volonté de vivre ensemble des Tchadiens, en ce sens que les intentions politiques inavouées derrière ces lois sont pour le moins iniques. La crise politique est patente avec le bras de fer entre la société civile et le gouvernement d’Allah-Maye Halina. Elle est née de la concentration des sièges dans une partie du pays au détriment de la partie démographiquement majoritaire.
Cette situation existe dans l’histoire de droit dans une certaine mesure. Il s‘agit de la pratique moins répandue du gerrymandering. A savoir que le gerrymandering, terme nord-américain, consiste en un découpage électoral partisan ou encore le charcutage électoral des circonscriptions électorales ayant pour objectif de donner l’avantage à un parti, à un candidat ou à un groupe donné.En théorie américaine ou canadienne, c’est une stratégie consistant principalement à « découper les districts électoraux de manière à regrouper le nombre de votes à ceux qui sont perçus comme opposants, à l’intérieur d’un nombre restreint de districts où le parti au pouvoir va perdre dans une forte portion, mais où il va gagner par de petites majorités ailleurs, dans un plus grand nombre de districts ».
Cette pratique a pris naissance aux Etats-unis, précisément en 1881 quand, quelque peu avant l’élection présidentielle, le gouverneur du M assachusetts, Elbridge Gerry, fut accusé d’avoir « redécoupé » la circonscription d’un comté afin de favoriser son parti. La polémique a éclaté quand les journaux avaient publié une caricature d’Elkana Tisdale, représentant la forme de la circonscription comme celle d’une salamandre. Plus de 200 ans après, cette pratique qui a mis à mal la cohésion sociale des Américains, s’est emparée du Tchad mais a deux différences près : le pays de Toumaï est fragile et ce charcutage électoral est perçu et considéré comme ethnique par ses détracteurs parce que le but serait d’augmenter le pouvoir politique d’une minorité « ethnique ».
Tout le contraire de ce qui s’est passé aux Etats Unis où il s’agissait simplement de charcutage électoral à visée partisane », c’est-à-dire à motivation purement politique.Encore une fois, en situation actuelle au Tchad, les enjeux se situent moins au calcul politique, pour des raisons connues… Le péril est lié au déni d’existence d’une sensibilité socioculturelle qui se voie exterminée ou fortement réduite à l’assemblée nationale pour des raisons non connues. Ce qui angoisse tant.
Les enjeux sont alors philosophiques, anthropologiques, socioéconomiques. Ainsi, la cartographie électorale des législatives fausse foncièrement le principe de représentation des citoyens à l’Assemblée nationale ; consacre l’injustice et l’inégalité de voix électorales ; exclut une partie de Tchadiens. C’est pourquoi, quoi qu’on dise, il faut redéfinir la règle du jeu de la représentation nationale afin d’obtenir un juste milieu.